Disons que Fred Perrin a un style qui nécessite à la fois une ouverture d'esprit conséquente, ainsi qu'un sens aigu pour le second degré.
En effet, en découvrant son travail pour la première fois, on adhère pas forcément. La plupart de ses lames font en effet récup' ou bien l'art sympa et déjanté de faire une lame à partir d'un bout de métal qui traine dans l'atelier.
Moi, je dois avouer que j'ai trouver ça très moche la première fois que j'ai vu son travail en photos.
Et puis, chemin faisant, ça m'a renvoyé à des souvenirs de gosse. Quand je polissais sur un gros caillou un baton de glace en bois pour en faire une lame de la mort qui tue. Ou alors le plaisir du dremeleux adolescent de prendre un vieux couteau de cuisine ou de table et d'en faire un couteau de lancer ou une lame de killer.
Parce que Fred Perrin, c'est aussi un peu ça (sans vouloir le traiter d'adulescent non plus). En discutant avec lui, on voit tout de suite qu'il s'éclate comme un gosse à faire ce qu'il fait, sans complexe. Que ce soit des lames (bowies, griffes, sharks, kiridashi, cleaver et j'en passe) qui peuvent servir à des fins utilitaires, ses spikes pour la défense ou des gros délires comme des masses d'arme.
Ensuite, quand on découvre son travail sur un salon, on voit tout de suite qu'il chie à mort ses finitions. Les plaquettes des manches sont grossièrement montées, les rivets sont tellement fixés à la va vite qu'il en brule ou écaille le bois et j'en passe, certaines lames portent encore les traces et rayures de backstand et autres lapidaires. Même ses émoutures en chisel ont une origine un peu j'menfoutiste : ça lui casse ouvertement les bonbons de s'arracher à faire des double émoutures. Pour l'utilité qu'on fait de ses lames, un chisel suffit amplement.
Et pis en discutant avec lui, on découvre aussi sa philosophie. Qu'un couteau, à la base, c'est pas pour être joli. C'est un manche et une lame. C'est fait pour servir, sans aucune fioriture. Lui, ça le fait chier que ses couteaux restent en vitrine. Ses couteaux sont robustes, d'une très grande recherche dans l'ergonomie et surtout ils coupent !!! Il connait son métier au niveau aiguisage et traitement thermique !
Je possède une griffe custom de Fred, et c'est sans doute la lame que je porte le plus souvent à la maison comme à l'extérieur. Pour ouvrir un pack d'eau récalcitrant, je peux me servir de sa lame tout en gardant le couteau en main pour manipuler ce que je veux des deux mains. Le shark a aussi été conçu dans cette optique, quand on reçoit par exemple des colis et on ne veut pas avoir les mains encombrées par un couteau, qu'on doit poser (faire tomber sur le pied pour les maladroits) pour manipuler le carton. La lame reste en sécurité autour du doigt, comme un prolongement naturel de la main, qui sert ou pas (une griffe quoi !).
Reste ensuite la question du prix, 80 à 90euros le shark D2, environ 110 le custom, environ 240 euros la griffe custom, c'est clair que c'est un investissement pour ce que c'est au prime abord (je ne parle pas de ses grandes lames Bowie ou PPF, qui à environ 270euros sont très peu cher pour leur qualité). Mais bon, on parle quand même d'un des rares couteliers français qui soit connu internationalement, chacun de ses couteaux est gage de qualité et de solidité (il suffit de se renseigner sur les tests en pleine nature qu'il fait passer à ses lames).
Après, l'optique SD, c'est à prendre ou à laisser. Il ne faut pas tout prendre non plus au sérieux ce qu'il fait
Edit : j'ai mis ici pas mal de prix à titre indicatif, pas pour en faire une démarche commercial ou publicitaire. Je ne connais pas Fred autrement que comme simple client occasionnel et quidam passant devant sa table. Je laisse au modo le choix de censurer ou non.