Madnumforce a écrit:Wah... super, Bedes! Avec en annexe les raw data pour faire du peer-reviewing! Ca c'est du bon boulot!
Je suis étonné par deux choses: d'une part, le "creux" entre 105 et 110cm de longueur de lame, qui peut être du à la petitesse de l'échantillon, mais qui peut éventuellement aussi suggérer la superposition de deux répartitions statistiques, l'une ayant un max de fréquence entre 100 et 105, et l'autre entre 110 et 115, et d'autre part le caractère assez peu normal de la distribution statistique de la position du CdG (a priori, on s'attendrai à ce que ça le soit).
(Au fait, c'est Bedres avec un R, hein
)
On pourrait voir dans cette distribution de longueur de lame un lien avec les proportions données à l'époque par les maîtres espagnols ou italiens. Je l'explique dans l'article. La moyenne de taille était à l'époque entre 1,67m et 1,70m. Pour moi, qui mesure justement 1,70m, une lame de 104cm correspond aux proportions données par les Espagnols, et 112cm à celles des Italiens.
Après je pense qu'il faut se méfier, déjà parce que la taille moyenne pouvait varier suivant les époques et les zones géographiques, qu'on ne sait pas au juste si ces proportions mentionnées étaient appliquées par la masse, l'influence des modes, etc. J'avais commencé par étudier les rapières de la Wallace Collection, cette séparation était extrêmement nette, on avait deux gros pics. En ajoutant les données des autres musées elle s'est progressivement lissée avec le reste, pour obtenir un pic à deux têtes. Bref, je pense que c'est plus probablement un artefact statistique.
Pour le CdG, je pense que j'en ai clairement beaucoup trop peu pour être vraiment représentatif. En plus, on trouve un peu à boire et à manger dans les rapières historiques : des armes civiles ou militaires, à utiliser à pied ou à cheval, à lames courtes ou longues, plutôt orientées cut&thrust ou estoc pur... et que suivant les cas, le CdG est susceptible de varier "grandement".
Je m'étais amusé à faire des stats là-dessus, d'ailleurs, j'avais noté que l'écart-type du CdG sur les rapières longues était beaucoup moins important que sur les lames courtes (de mémoire, il était de 15mm sur les longues pour plus de 30mm sur les courtes). Ce qui est relativement logique : les lames de 110 à 120cm ne sont jamais des armes de taille, alors que les lames de 100cm peuvent être aussi bien orientées taille qu' estoc, et donc nécessiteront plus ou moins de présence de lame.
Pour l'affinement des lames, ça ne m'étonne absolument pas. Ce genre de profil à forte diminution à la base puis diminution quasi-linéaire est extrêmement courant. J'ai pas mal de serpes qui sont comme ça, et tous mes sabres à lame type "à la hussarde" (lame large à large pan creux) marquent ce genre d'affinement (moins pour des sabres plus adapté pour l'estoc, comme le 1822 de cavalerie légère ou le 1845 d'infanterie).
Johnsson m'avait dit que, sur la quasi-totalité des épées médiévales ou Renaissance qu'il avait étudiées, on retrouvait le même profil de distal taper : une baisse brusque d'épaisseur sur le premier cinquième, puis une diminution douce sur les trois cinquièmes suivant, et encore une diminution brusque sur le dernier cinquième. Ici on en serait assez proche, nonobstant la prolongation assez extrême de la lame.
C'est assez marrant de voir qu'on retrouve aussi ça sur les couteaux de cuisine anciens. Si je prends l'exemple de mon gros Bargoin l'Enclume que tu as eu entre les mains, c'est typiquement ça : une lame très épaisse à la garde, mais une épaisseur qui diminue brusquement pour donner une lame fine sur les trois derniers quarts. Je pense que c'était le moyen le plus simple de combiner une soie assez épaisse à une lame qui soit un minimum fine pour être efficace en coupe (et surtout plus légère...).