Vernante est un village du Piémont italien situé en fond de vallée de la Vermegnana, à quelques kilomètres seulement de la frontière française
Passage obligé sur la route qui relie Nice à Turin, le village a une histoire industrielle marquée par la fabrication du verre et par une activité coutelière très ancienne.
Au XVème siècle, Vernante était déjà un village de forgerons qui exportaient leur production loin de leur province. Des documents retrouvés dans la cathédrale de Barcelone font état d’échanges commerciaux de fers de lances importés de Vernante.
Au 19ème siècle Vernante était encore un important centre coutelier.
Les maisons qui bordent la rue principale abritaient au rez-de-chaussée les ateliers de plus de vingt forgerons qui produisaient à plein temps des couteaux envoyés vers tous les marchés d’Italie, "Les Vernantins".
Le Vernantin est un couteau dit à la piémontaise.
Traditionnellement sa lame est forgée dans des aciers d’outils agricoles de récupération. Dans la forme de sa lame en feuille de saule proche de celle des Navaja Catalane on peut deviner une influence Ibérique sans doute inspirée à l’occasion des échanges commerciaux avec la Catalogne.
Le manche est traditionnellement en corne de vache ou de bélier, mais le buis des vallées de Cunéo est parfois utilisé.
La plus marquante particularité du Vernantin c’est "la brocca" cette lentille forgée dans le prolongement de la lame et qui vient se caler couteau ouvert dans un évidement façonné au dos du manche. Le couteau s’ouvre d’une main en faisant pivoter la lame avec le pouce posé sur la lentille, ou comme le faisait les anciens en frappant la "brocca" sur le bord d’une table.
Des couteaux du même type sont fabriqués dans tout le piémont et portent le nom de leurs villages d’origine. Le Frabusan à Frabosa, le Puragnin à Peveragno le Garessin à Garessio, le Barachin à Baracco, tous sont des déclinaisons du Vernantin.
Le Piémont est une région rurale ou le couteau est indispensable pour toutes les tâches quotidiennes courantes. Tous les paysans, les bergers, les vignerons en ont un en poche pour les travaux aux champs, les repas, et même pour se raser.
Aujourd’hui, les "cutlè" professionnels qui ont perpétué la fabrication du Vernantin jusqu’à la fin des années 90 n’exercent plus. Seuls quelques hobbystes produisent encore des Vernantins, sans toutefois réussir à satisfaire la demande.
Ils se veulent les dignes héritiers de Giacomo Vallauri ; Martini ; Dalmasso et le plus emblématique d’entre eux Mario Vallauri dit : "il sordomutto" le sourd muet.
Malheureusement ces vingt dernières années des productions industrielles de médiocre qualité sont apparues, certaines en provenance de Chine.
Pour protéger les quelques couteliers qui perpétuent encore la tradition, la commune de Vernante a défini une charte et déposé le nom "Vernantin" puis a fini par le céder à Giovanni Mondino coutelier hobbyste.
Un autre coutelier du nom de Martini prévoyait de mettre en place une formation professionnelle pour transmettre l’art et les techniques de fabrication du couteau Vernantin. Son décès a mis fin au projet.
Dimanche j’ai passé la journée à Vernante avec Alessandro Simonetti. Comme chaque année au mois de juin, une exposition de couteaux y est organisée dans les rues du village.
Une quinzaine de couteliers hobbystes y exposent leurs couteaux pendant qu’Alessandro propose des démonstrations de forge.
En pleines explications
Alessandro dans ses œuvres.
Quelques photos de sa table
J’ai fait quelques photos dont vous excuserez la mauvaise qualité. Je suis un piètre photographe et la lumière filtrée à travers le barnum jaune ne m’a pas aidé.
Quant aux tables, la quasi-totalité des exposants avaient placé leurs couteaux dans des vitrines (à la demande des organisateurs pour raisons de sécurité) dont les reflets ne m’ont pas aidé non plus.
Pour terminer la visite j’ai fait un tour dans les rues du village à la rencontre de Pinocchio…
Sur les façades plus de 130 fresques représentent des scènes relatant les aventures du célèbre petit pantin de bois.
Pinocchio est né de l’imagination de Carlo collodi en 1883, mais c’est en 1911 qu’Attilio Mussino lui donne son apparence actuelle en illustrant les planches originales du livre de Collodi.
À la mort de Mussino, sa veuve a fait don des œuvres de son mari à la commune de Vernante.
Inspiré par les façades décorées des maisons Bavaroises, c’est le facteur du village, Bruno Carletto dit "Carlet", et Bartoloméo Cavallera dit "Méo", qui ont proposé aux habitants de décorer leurs façades.
Les premières fresques ont été réalisées à partir de 1989 par le peintre-facteur et son assistant.
Voilà ! J’espère vous avoir donné envie de faire le détour. Si vous passez par-là n’hésitez pas à vous arrêter le village est sympa et la cuisine excellente.