par Nicorelou » 29 Jan 2022 00:18
D'un point de vue thermochimique, le "grain" se forme et grossit à partir de la température d'austénitisation (et donc a fortiori de trempe), quel que soit l'acier.
- Pour durcir un acier, il faut créer des cristaux de martensite.
- Pour créer des cristaux de martensite, il faut refroidir rapidement des cristaux d'austénite chargés en carbone.
- Pour créer des cristaux d'austénite chargés en carbone il faut fait chauffer des cristaux de ferrite et des carbures.
=> Les cristaux d'austénite se forment sur des sites de nucléation situés aux frontières entre les carbures et les cristaux de ferrite, et grossissent pour remplacer petit à petit ces derniers en dissolvant les carbures pour s'alimenter en carbone, jusqu'à avoir consommé tous les carbures disponibles (acier hypo-eutectoïde) ou remplacé toute la ferrite (acier hyper-eutectoïde). Lors du refroidissement, chaque cristal d'austénite ainsi créé va se changer en martensite, conservant la taille qu'il a acquise lors de sa phase austénitique. En clair, pour durcir l'acier en martensite, il faut forcément commencer par créer et faire grossir des cristaux d'austénite.
Ce qui avantage les aciers fortement alliés dans ce processus (et tout particulièrement ceux issus de la métallurgie des poudres), c'est une densité importante de petits carbures, qui vont multiplier les sites de nucléation et donc limiter la taille des cristaux d'austénite formés à partir de ces sites (plus de cristaux = moins de place pour chaque). D'une certaine manière, la taille et la densité des carbures "fixe" la taille maximale que les cristaux d'austénite peuvent atteindre et donc le "grain" de l'acier final.
Il n'en reste pas moins qu'un acier fortement allié peut également contenir une faible densité de gros carbures, ce qui donnera en retour de gros cristaux d'austénite et donc de martensite car moins de sites de nucléation potentiels. C'est par exemple le cas s'il n'a pas été correctement normalisé ou s'il a été au préalable porté à haute température pendant trop longtemps. En forgeant un acier fortement allié, par exemple, on prend le risque de faire grossir ses carbures (et conséquemment d'en réduire le nombre) de façon involontaire. Enfin, à température trop élevée, les cristaux d'austénite peuvent également se souder entre eux. Bref, il y a pleins de manière dont les choses peuvent mal tourner, même avec un acier fortement allié.
Tout cela évidemment est purement théorique et conditionné par le fait que j'ai tout compris au bouquin de 400 pages que je viens de lire sur la métallurgie des aciers, et qui a le bon goût de n'être disponible qu'en anglais.