Madnumforce a écrit:Le problème, c'est vraiment le slag, intrinsèque à la réduction en bas fourneau sans passage par une phase liquide.
On avait conscience de ce problème par le passé, ce qui pouvait d'ailleurs justifier l'utilisation de minerai plus "purs" que d'autres. Une fois la loupe recueilli dans le bas fourneau, on pouvait améliorer les choses. Tu a décris la cémentation et le cinglage, on pourrait y ajouter le puddlage utilisé jusque dans les années 1900.
Quand on voulait obtenir des aciers fins (pour les armes de qualité ou pour les ressorts d'horlogerie) on utilisait des méthodes différentes. On partait d'une matière déjà élaborée par les méthodes décrites ci-dessus, et on utilisait des creusets.
La personne ayant assuré la diffusion de cette méthode (probablement déjà utilisée ici ou là avant la pratique des brevets, innovation anglaise ayant favorisé l'innovation) est Benjamin Huntsman (1704 - 1776). Je donne ici l'extrait de wikipédia, puisqu'il met en avant la qualité des couteaux français de la fin de l'ancien régime :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Benjamin_HuntsmanIl commence ses recherches à Doncaster avant de déménager à Handsworth, près de Sheffield. Il développe son procédé, consistant à fondre des charges de 34 livres (soit 15,4 kg) dans des creusets en terre cuite. Le creuset, rempli de morceaux d'acier, est fermé, puis est chauffé avec du coke pendant près de 3 heures. L'acier en fusion est alors coulé dans des moules et les creusets sont réutilisés1.
L'apport de Huntsmann à la production d'acier est essentiel car son procédé permet de garantir la qualité de l'acier. Percy attribue à Huntsman ce progrès décisif :
« Anciennement, l'acier n'était jamais fondu ni coulé après sa fabrication ; dans un seul cas, celui du wootz, il était fondu pendant la fabrication même. Quelle que fût la méthode […] l'acier en masse n'était pas obtenu à l'état homogène. Même par la cémentation du fer en barres, certains défauts qui se manifestent dans la fabrication du fer, surtout ceux inhérents à la présence des laitiers, se perpétuaient plus ou moins dans l'acier en barres[…]. Or la fusion et le moulage de l'acier remédient au mal signalé, et l'on peut ainsi se procurer des lingots d'une composition parfaitement homogène dans toutes leurs parties. C'est à Benjamin Huntsman que l'on est redevable de la solution pratique de cet important problème1. »
— J. Percy, Traité complet de métallurgie, tome 4, p. 265-266
Cette qualité permet, par exemple, de réaliser des ressorts très performants pour l'horlogerie, tel que celui du chronomètre de marine de Harrison pour mesurer la longitude. La méthode est mal adaptée à la production de pièces volumineuses, mais de nombreuses améliorations vont rapidement voir le jour pour traiter ce problème. Krupp s'y distingue, parvenant à couler un lingot de 2,25 tonnes en 1851, et de 21 tonnes en 1862.
Pourtant, l'industrie locale refuse d'utiliser cet acier, car il s'avère plus dur que celui qui était jusqu'ici importé d'Allemagne. À ses débuts, Hunstman n'a donc pas d'autre choix que d'exporter son métal en France. Mais la concurrence grandissante des couteux français, réalisés à partir de l'acier au creuset inquiète les coutelleries de Sheffield. Après avoir, sans succès, tenté d'interdire l'exportation d'acier au creuset, les industriels anglais sont contraints d'adopter cet acier2.
En 1770, il s'installe à Attercliffe, où son entreprise prospère encore pendant six ans, bien que « jamais il ne consentit à faire prospérer ses affaires par aucun des moyens si communs aujourd'hui1 ». Il y décède le 20 juin 1776. Son affaire est reprise par son fils William Huntsman (1733–1809).
« … que celui qui n’a point d’épée vende son vêtement et achète une épée ».