AGONE a écrit:Bedreskungs a écrit:Ah ouais, non, 6mm c'est trop fin. En général sur les rapières, au ricasso l'épaisseur va de 7mm environ pour les lames les plus larges (style 3 à 3,5cm), à plus de 10mm pour les lames plus fines. Les lames vont probablement être très souples, en conséquence, un peu comme sur les Lutel (qui sont dans les mêmes prix, d'ailleurs).
Ouais sauf que sur les rapières d'époque les aciers étaient pas tout à fait les même non plus , hein ! Et que pour compenser le manque d'homogénéité de l'acier ( qui risquait d'occasionner de la casse ) ils montaient les revenus super haut ( j'ai de la doc qui date de 1750 ou il est question de monter les lames en début de luminaissance pour le revenu, soit au moins 500 degré ) d'où une plus grande flexibilité qu'avec un acier moderne revenu à 50-52 HRC . Après c'est clair que 6mm c'est le mini, mais traité à cette dureté avec leur alliage au chrome / vanadium ça devrait le faire .
Madnum : pour ce qui est de l'aiguisage faut pas déconner ! Pour avoir un convexe pas trop épais sur un fil de 1mm tu vas perdre quoi en poids ?? 30 grammes ? 50 ?? Il est pas question d'y faire une émouture en full flat avec zéro bevel ! Aucune épée n'était faite comme ça ! Y avait toujours un convexe plus ou moins marqué. Même sur les Katanas d'ailleurs, c'est une invention moderne les lames avec zéro niku, ou le résultat de multiples polissages …
Excuses-moi, mais tu confonds deux choses qui n'ont rien à voir: la limite élastique et le coefficient d'élasticité. le traitement thermique va énormément jouer sur la limite élastique et la résistance mécanique, mais de tout ce que j'ai pu lire, le coefficient d'élasticité, lui, est intrinsèque au métal. C'est à dire que quel que soit le traitement thermique, une lame contenant 99,X% de fer aura toujours le même coefficient d'elasticité (ou module d'Young). C'est extrêmement contre-intuitif, mais de ce que j'ai compris, c'est lié uniquement à la structure des couches électroniques de l'atome, qui ne sont pas affectées par le traitement thermique, ou alors de manière négligeable. On considère que le module Young des aciers "communs" est de 200 ou 210 GPa, peu importe la nuance ou le traitement thermique. Je suppose qu'on peut être plus prudent en ce qui concerne les inox et les aciers type HSS, où on dépasse largement les 10%, parfois les 20% en masse d'éléments d'alliage, mais pour les aciers dont il est question ici, toujours faiblement alliés, il faut partir de l'idée qu'ils ont le même coefficient d'élasticité.
Donc la seule chose qui détermine la rigidité ou la souplesse élastique d'une lame, c'est bien les caractéristiques géométriques de la lame, en particulier la section (plus précisément: l'évolution de la section en fonction de l'emplacement sur l'axe de la longueur). "Toutes choses égales par ailleurs", comme le veut la formule consacrée qui ne veut un peu rien dire, en supposant deux lames ayant le même distal taper proportionnellement à leur épaisseur au ricasso, l'une faisant 6mm d'épaisseur au ricasso, l'autre 9mm, il me semble que la seconde sera au moins (9/6)^3 ≈ 3.4 fois plus rigide que la première (le moment quadratique par rapport à un axe met l'épaisseur au cube). Bon évidement, le truc c'est qu'une lame de 6mm au ricasso n'a pas le même distal taper, même proportionnellement, qu'une lame de 9mm d'épais au ricasso. Les lames à ricasso épais forment un véritable talon, renforcé assez localement, pour retomber assez vite à un épaisseur plus faible, en l'occurence assez proche des lames sans ce "talon", donc ce "calcul" n'est pas à prendre très au sérieux, c'est juste qu'une petite différence d'épaisseur fait très vite une importante différence de rigidité. Ne serait-ce qu'un seul millimètre d'épaisseur de plus dans le fort de la lame va rendre la lame pas mal plus rigide pour un supplément de poids assez faible.
Bon, sinon c'est vrai que j'ai un peu exagéré l'impact sur l'équilibre d'un tranchant de 1mm. Mais c'est que je connais globalement les défauts des productions modernes, et notament cette absence de "talon", et en général une trop grande finesse de lame (au niveau de l'arrête, je veux dire). Plus on cummule de défauts, plus on s'éloigne d'une dynamique conforme aux originaux. Par contre, vu que sur les rapières, le rapport largeur/épaisseur de section est assez faible, un quasi zero grind peut passer quand même. L'important est juste d'avoir un angle au tranchant suffisament robuste, et là on peut l'avoir. Bien sûr, ça sera probablement bombé au tranchant, surtout qu'on a parfois des pointes de section lenticulaire, mais contrairement à d'autres types de lame, ont a pas forcément besoin de marquer une différence importante entre l'angle de l'émouture et l'angle au tranchant.
Dans "le Gassendi" (l'aide mémoire à l'usage des officiers d'artillerie, qui est une bible), on trouve détaillé ce revenu à la luminescance naissante. Gassendi s'est juste occupé de la création de tous les modèles de sabres règlementaires, An IX et XI de cavalerie légère et de cavalerie lourde, du 1816, puis aussi des deux 1822, et dans son aide-mémoire il détaille par le menu toute la production du matériel, jusqu'au nombre de lames de sabres que le forgeron et son apprenti font en une journée de travail, et combien il faut les payer pour ça, et combien ils vont consommer de charbon, etc... C'est une source d'une parfaite sûreté. Et finalement, quand on y réfléchit, ce revenu pour nous assez choquant n'est pas forcément si terrible que ça. Okay on monte haut, mais on reste quand même très largement en dessous de la température d'austénitisation, et surtout on y reste vraiment pas longtemps: juste le temps d'atteindre la couleur. On se rapproche presque du "flash tempering"… idéalement. Evidement, derrière on va pas biller à 55HRC...