Un vieux texte (année 1940 environ) issu d’un livre intitulé « froissartage » de Michel Froissart, que les anciens scouts connaissent peut-être…
Un texte qui peut paraître d’un autre temps, mais les « poèmes » sur les couteaux ne courent pas les rues, vous en conviendrez….
Hommage à mon couteau…
Ne m’en veuille pas, mon cher couteau, de ne t’avoir pas compris parmi les outils – pas davantage Brillat-Savarin n’a parlé du sel sans lequel il n’y aurait aucun mets succulent. Reconnais au moins que jamais ta lame n’a été souillée par la rouille, car jamais elle n’a cessé son travail, et jamais non plus tu n’as refusé le travail, car ton acier a toujours été affilé ; avec toi j’ai dépecé la bête fauve, j’ai saigné mon cheval, j’ai débridé des plaies, tu étais toujours prêt.
Je voudrais que chacun ait un ami aussi sûr, point n’est besoin de rechercher la qualité d’un outillage si déjà on n’a pas essayé de tirer de toi les infinies ressources que tu offres. Il faut aller du simple au composé, tu es le simple. Mais la famille est vaste et l’on y rencontre de nombreux bâtards. Ils ont encore la forme, mais ils ont perdu le sens de leur raison d’être.
Combien de nous les hommes pourraient en dire autant qui ont des pieds qui ne marchent pas, ou qui ont des doigts pour en polir les ongles. D’autres se croient capables d’un effort, mais à l’œuvre, ils ploient et succombent, leur âme n’étant pas trempée, leur corps n’étant pas forgé ; ils ne sont pas faits pour tailler, mais pour se faire tailler. C’est une gloire pour eux d’être inoxydables, même si cette qualité est obtenue à l’aide d’un vice rédhibitoire.

Bonne soirée à tous.