par Efix » 27 Nov 2012 09:38
Le luxe ne s'apparente pas forcément au mauvais goût : il y a quelques années, un grand collectionneur, sans doute, le plus grand, à l'époque, m'avait dit "certains couteliers croient m'attirer avec des couteaux dans lequel ils ont incrusté des diamants... Ils n'ont rien compris, car si je veux des diamants, je sais où les acheter, à Anvers, bien plus beaux et beaucoup moins chers..."
Il a lancé de nombreux couteliers, contribué à en faire vivre pas mal. Il y avait de tout, dans sa collection, certains couteaux étaient un peu "trop", mais ils les avaient achetés plus pour rendre service à un coutelier qui avait bossé en pensant le satisfaire. Mais son vrai fond de collection était constitué de pièces splendides, dans des thématiques précises - scènes animalières (les oiseaux de Blum et beaucoup d'autres dans ce genre, comme ceux de Roulin, qu'il avait fait connaître), l'histoire américaine (la série des Centofante avec scrimshaw représentant l'épopée américaine), damas poétiques (scwharzer, Viallon, Reverdy, Darryl Meyer...). Il avait beaucoup de Tai Goo, un coutelier que j'adore, du Virgil England, en fait, il avait tout ce qui se faisait à l'époque (années 80/90 et début 2000). Enormément de Randall rares, aussi.
Mais lorsque nous allions à la pêche, dans son ranch du Michigan, il emportait des couteaux sobres : Baraldini, Chap Haynes, Randall ou Ardennlame de Jean Tanazacq, par qui il avait découvert la coutellerie custom.
Par contre, j'ai assisté à des déballages, dans des chambres de collectionneurs américains, avant le Blade Show et là, j'avoue que c'était le comble de la ringardise.
Et nous n'en sommes qu'au début, avec l'arrivée sur le marché, de collectionneurs des pays émergents : russes, chinois, indiens... Et puis il y a les pétro dollars des pays du Golfe, mais eux, ont toujours aimé un certain style de couteaux, dont de jolies pièces sont depuis des lustres dans les musées comme Topkapi.
Les italiens, c'est assez différent : ils aiment le luxe, un certain luxe. Milan est une ville assez particulière, avec la plus grosse densité (avant la chute du mur...) de manteaux de vison au KM2. La salon de Milan a longtemps été le terrain de chasse favori de quelques grands collectionneurs italiens, qui pensaient (à juste titre ou pas), qu'ils "faisaient le marché" du couteau haut de gamme : Lake, Loveless, Johnson, Loerchner, Kressler, etc... Mais il y a encore peu de temps, les couteaux étaient luxueux, certes, mais d'un luxe modéré - un beau fermant de Lake, un intégral de Kressler n'ont pas besoin d'artifices.
Aujourd'hui, on assiste à une espèce de surenchère... Bon, la gravure, c'est de tradition à Milan, Val Trompia est à côté et cette tradition est séculaire... Mais il est vrai que pour certaines pièces, on atteint les limites de ce qui peut encore faire désigner un objet comme un couteau.
Mais peu importe, si cela contribue à faire bien vivre des couteliers, leur permettant de travailler en toute sérénité à des pièces plus sobres, sans le souci du lendemain.